Voici deux textes aujourd'hui
:
- un appel d'intellectuel européens publié
aujourd'hui (notamment dans le quotidien parisien
Libération)
- d'autre part, plus bas, le lien avec un texte
alarmant : Situation tragique dans les hopitaux grecs.
Luc Douillard pour "Je suis
grec".
Gauche grecque et Europe
démocratique
Cet appel, signé par un collectif
d’intellectuels européens, a été publié dans l’édition de Libération du 5 juin
2012. Il fera l’objet d’une pétition bientôt ouverte à
signatures.
Dans l’enchaînement d’événements qui ont jeté la
Grèce au fond du gouffre, chacun sait que les responsabilités des partis au
pouvoir depuis 1974 sont écrasantes. Ils n’ont pas seulement bénéficié de la
corruption et des privilèges, ils en ont fait bénéficier largement les
fournisseurs et les créanciers de la Grèce.
On pourrait s’étonner, dans ces conditions, que les
dirigeants européens et le FMI, transformés en parangons de vertu et de rigueur,
s’emploient à ramener au pouvoir ces mêmes partis faillis et déconsidérés,
dénonçant le «péril rouge» incarné par Syriza et promettant de couper les vivres
si les nouvelles élections du 17 juin confirment le rejet du «Mémorandum». Cette
ingérence n’est pas seulement contradictoire avec les règles démocratiques, ses
conséquences sont dramatiques pour notre avenir commun.
Il y aurait là une raison suffisante pour que nous
refusions de laisser faire. Mais il y a plus grave. Depuis deux ans, les
dirigeants de l’Union européenne travaillent à déposséder le peuple grec de sa
souveraineté. Sous prétexte d’assainir les finances publiques et de moderniser
l’économie, ils imposent une austérité qui étouffe l’activité, réduit la
majorité de la population à la misère, démantèle le droit du travail. Ce
programme de «redressement» néolibéral se solde par la liquidation de l’appareil
productif et le chômage de masse. Pour le faire passer, il n’a fallu rien de
moins qu’un Etat d’exception sans équivalent en Europe occidentale depuis la fin
de la Seconde Guerre mondiale : le budget de l’Etat est dicté par la troïka, le
Parlement grec réduit à une chambre d’enregistrement, la Constitution
contournée. La déchéance du principe de la souveraineté populaire va de pair
avec l’humiliation de tout un pays. Or, si elle atteint ici des sommets, elle ne
concerne pas exclusivement la Grèce. Ce sont tous les peuples de ses nations
constitutives que l’Union européenne tient pour quantités négligeables lorsqu’il
s’agit de combiner les interventions du FMI et de la BCE en faveur du système
bancaire, ou d’imposer des gouvernements de technocrates non-élus.
A plusieurs reprises, les Grecs ont fait savoir
leur opposition. D’innombrables manifestations de masse, 17 journées de grève
générale en deux ans, comme les actions de désobéissance civique ou le mouvement
des Indignés de Syntagma, telles ont été les marques sans équivoque de leur
refus du sort qu’on leur réserve sans les consulter. La seule réponse qu’ils ont
reçue aura été le doublement de la dose létale et la répression policière !
C’est alors, dans un contexte de délégitimation complète des gouvernants, que le
retour aux urnes est apparu comme la seule issue pour éviter l’explosion
sociale.
Mais l’affaire est claire à présent : les résultats
du 6 mai ne laissent aucun doute sur le rejet massif de la politique imposée par
la troïka. Et, devant la perspective d’une victoire de Syriza aux élections du
17 juin, une campagne de désinformation et d’intimidation a été déclenchée aussi
bien à l’intérieur du pays qu’au niveau européen. Elle vise à disqualifier
Syriza comme interlocuteur politique. Tous les moyens sont bons pour cela, à
commencer par son étiquetage «extrémiste» et le parallèle aussi absurde
qu’indécent avec les néonazis d’Aube dorée. Toutes les tares lui sont imputées :
escroquerie, double langage, infantilisme revendicatif.
A en croire cette propagande haineuse qui prend le
relais de la stigmatisation raciste du peuple grec, Syriza mettrait en danger
les libertés, l’économie mondiale et la construction européenne. La
responsabilité des électeurs grecs et de nos dirigeants serait de lui barrer la
route. Brandissant la menace d’exclusion de l’euro et d’autres chantages, une
manipulation du vote populaire se met en place. Par cette «stratégie du choc»,
les groupes dominants s’efforcent de détourner le vote à venir selon leurs
intérêts, qu’ils prétendent être aussi les nôtres.
Nous, citoyens européens, ne saurions nous taire
devant cette tentative de déposséder un des peuples de l’Union de sa
souveraineté, dont les élections forment le dernier recours. Il faut que cessent
la campagne de stigmatisation de Syriza et les chantages à l’exclusion de
l’eurozone. C’est aux Grecs de décider de leur sort, en rejetant tout diktat, en
repoussant les poisons économiques administrés par leurs «sauveurs», en
s’engageant librement dans les coopérations indispensables pour surmonter la
crise, avec les autres Européens.
Nous l’affirmons : il est temps que l’Europe
perçoive le signal envoyé le 6 mai par Athènes, abandonnant une politique qui
ruine la société et met les peuples sous tutelle afin de sauver les banques. Il
est urgent de bloquer la dérive d’une construction politique qui institue la
toute-puissance des opérateurs financiers. Il faut une Europe qui soit l’œuvre
de ses citoyens, au service de leurs intérêts.
Cette nouvelle Europe que, comme les forces
démocratiques en train d’émerger en Grèce, nous appelons de nos vœux, est celle
de tous ses peuples. Dans chaque pays, ce sont deux Europes incompatibles qui
s’affrontent aujourd’hui : celle de la dépossession des êtres humains, et celle
qui affirme le droit de tous à une vie digne de ce nom et s’en donne
collectivement les moyens.
Ce pour quoi nous nous battons avec les électeurs
et les militants de Syriza, ce n’est pas la disparition de l’Europe mais sa
refondation. Car c’est l’ultralibéralisme qui suscite la montée des
nationalismes et de l’extrême droite. Les vrais sauveurs de l’idée européenne
sont les défenseurs d’une Europe où la souveraineté populaire n’est pas abolie
mais étendue et partagée.
Oui, à Athènes, c’est bien l’avenir de la
démocratie et de l’Europe elle-même qui est en jeu. Par une étonnante ironie de
l’histoire, les Grecs se retrouvent en première ligne de notre combat commun.
Ecoutons-les, soutenons-les, défendons-les !
Signataires :Etienne Balibar philosophe, Vicky
SKOUMBI rédactrice en chef de la revue grecque αληthεια, et Michel VAKALOULIS
philosophe et sociologue.
Et aussi : Giorgio AGAMBEN, Tariq ALI, Elmar
ALTVATER, Daniel ALVARO, Alain BADIOU, Jean-Christophe BAILLY, Fethi BENSLAMA,
Fernanda BERNARDO, Jacques BIDET, Claude CALAME, Thomas COUTROT, Albano
CORDEIRO, Yannick COURTEL, Costas DOUZINAS, Roland ERNE, Roberto ESPOSITO, Nancy
FRASER, Elisabeth GAUTHIER, François GèZE, Max GRATADOUR, Jean-Pierre KAHANE,
Jean-Marc LéVY-LEBLOND, Michael LöWY, Philippe MANGEOT, Philippe MARLIèRE,
Ariane MNOUCHKINE, Warren MONTAG, Jean-Luc NANCY, Toni NEGRI, Bertrand OGILVIE,
Ernest PIGNON-ERNEST, Mathieu POTTE-BONNEVILLE, Jacques RANCIèRE, Judith REVEL,
Rossana ROSSANDA, Bernard STIEGLER, Michel SURYA, Bruno TACKELS, André TOSEL,
Gilberte TSAÏ, Eleni VARIKAS, Dimitris VERGETIS, Jérôme VIDAL, Heinz WISMANN et
Frieder Otto WOLF.
----- Message reçu -----
From: "Eve"
Sent: Tuesday, June 05, 2012 1:18 PM
Subject: Situation tragique
dans les hôpitaux publics grecs ! Nouvelles Hors Les
Murs
Bonjour Luc,
Tu diffuses si tu peux. On est ds le plan que j'appelais "élimination catégorielle " de la population non productive.
Amitiés
Eve
1 commentaire:
It is about time that Mr. Schauble resigns.
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