vendredi 1 juin 2012

Les Grecs insultés hier par le journal français Le Monde ?

Les Grecs insultés hier par le journal français Le Monde ?

Bonjour,
Le secrétariat de la campagne d'opinion  internationale
"Je suis grec" / "Par solidarité, je suis grec aussi" , à Nantes,
http://jesuisgrec.blogspot.fr/
mail : jesuisgrec@numericable.fr
a reçu ce soir (jeudi 31 mai) un message issu de Michel Volkovitch, traducteur.

Il s'y indignait d'un dessin de presse paru hier (mercredi 30 mai 2012) en page 2 dans le grand journal parisien Le Monde (dessin à qui il semble manquer l'excuse du talent ? ou bien alors nous sommes incapables d'apprécier ce talent subtil à sa juste mesure ?), ceci pour insulter les Grecs terrassés par les injonctions stupides et contreproductives de la Troïka (Europe/FMI), prélude à une austérité forcée pour toute l'Europe, ceci en reprenant quelques poncifs et clichés racistes sur l'éternel Grec buveur d'ouzo pendant sa sieste, prétendument paresseux et de mauvaise foi.

Pour des raisons de droit d'auteur, nous ne reproduirons pas ici ce dessin intégralement (voir cependant les illustrations jointes de la publication concernée), mais voici sa description détaillée :

Deux personnages vautrés, couchés à terre à côté d'une bouteille d'alcool, dialoguent. Le premier déclare :

" - Se faire traiter de branleur* au moment où on allait se mettre à bosser...
Avoue que c'est très démotivant, "

L'autre répond : - " Sûr ! Bosse un peu quand même, passe moi l'ouzo ".

(En langue française familière et argotique, le mot branleur*, après avoir évoqué un acte sexuel de masturbation, signifie au sens figuré "personne qui ne fait rien", "paresseux" ou "fantaisiste" (cf. Dictionnaire le Robert historique). ("Bosse, bosser" signifie familièrement : travaille, travailler.)

Pour être certain qu'il s'agit des Grecs buveurs d'ouzo, figure à l'arrière plan un temple de style classique placé sur une hauteur, évoquant évidemment le Parthénon sur l'Acropole.

Nous rediffusons donc incomplètement des éléments de ce dessin. Mais nous diffusons intégralement ici l'indignation de Michel Volkovitch (en y ajoutant tout en bas un message qu'il nous avait fait passer cet hiver 2011-2012, invitant à lire les écrivains grecs contemporains.)


Début du message réexpédié :

De : Michel Volkovitch michel.volkovitch@wanadoo.fr

Date : 30 mai 2012 10:31:06 HAEC
Objet : Chez les Grecs

 Lettre à Xavier Gorce, dessinateur au Monde

 Hier en ouvrant mon journal, Monsieur, j’ai trouvé ça : [reproduction du dessin]

J’ai cru recevoir une gifle. Les Grecs, un ramassis de branleurs… 
J’ai cru entendre le gros rire d’Angela Merkel suivie par des millions de nantis du monde entier. Je ne savais pas que Le Monde pouvait courtiser un tel public de beaufs. Non, les Grecs ne passent pas leur temps à glander. Tous les Français n’ont pas un béret et une baguette sous le bras. Et les dessinateurs n’ont pas tous du talent. Connaissez-vous les Grecs ? Moi qui depuis trente ans les fréquente et les traduis, je peux vous l’assurer, et une étude publiée dans Le Monde le confirme : ils ne bossent pas moins que les Allemands. Ou que les Français. Ou qu’un dessinateur fort bien payé, sûrement, pour pondre son dessin du jour en un quart d’heure. Ils bossent dans des conditions souvent plus difficiles que nous, ou s’ils ne bossent pas, c’est qu’ils passent leur temps à chercher du boulot en vain. Les Grecs, voyez-vous, sont très attentifs au regard de l’étranger, surtout dans le creux de la vague où ils se trouvent. Le moindre signe de compréhension, d’encouragement, est précieux pour eux, accablés qu’ils sont du mépris glacé des puissants. Votre petit crobard, de ce point de vue, est d’une cruauté aussi gratuite qu’imbécile. J’ai toujours eu un problème avec votre humour, mais là on touche le fond. Attaquez-vous plutôt aux grands de ce monde, à vos riches et arrogants nouveaux patrons par exemple, ou à Mme Lagarde, qui gagne près de quarante fois le SMIC et ne paie pas d’impôts tout en accusant les Grecs de ne pas payer les leurs. S’acharner sur les victimes et non sur les bourreaux, c’est nul, c'est lâche. Allez donc vous faire voir, Monsieur le manchot. Mais pas chez les Grecs.

Michel Volkovitch traducteur  

Copie de cette lettre à tous mes amis concernés, Grecs ou Français.
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Message précédent de Michel Volkovitch à "Je suis grec" :

 Je traduis depuis trente ans les auteurs grecs (prose, poésie, théâtre) et me bats plus que jamais pour les faire connaître, c'est dire que votre combat et le mien se rejoignent. Je me permets de vous suggérer, s'ajoutant à vos justes initiatives, un autre mode d'action très simple : lire les romanciers et les poètes grecs, en achetant leurs livres. Et faire connaître ces livres autour de soi. Les offrir, organiser des manifestations où l'on parlera d'eux. Le meilleur moyen de faire aimer la Grèce, c'est de la montrer telle qu'elle est, loin des clichés habituels, et de donner à voir ce qu'elle nous offre de meilleur. Mon but dans l'affaire n'est pas de m'enrichir, mais avant tout d'éviter la faillite aux petits éditeurs courageux qui me soutiennent (Quidam, Ginkgo, les Vanneaux...) afin qu'eux et moi puissions continuer la lutte. Vous trouverez aux éditions en ligne publie.net certains des plus beaux textes grecs contemporains, et sur mon site www.volkovitch.com, à la rubrique MADE IN GREECE, une bibliographie, des textes de prose et de poésie ainsi que divers renseignements. Amitiés combattantes,

Michel Volkovitch

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Deux notes techniques de la campagne d'opinion "Je suis grec" :

>>> Les personnes qui souhaiteraient féliciter directement le dessinateur de presse Xavier Gorce pour la qualité de son humour et pour la générosité de ses sentiments européistes fraternels, peuvent lui écrire en commentaire sur son blog : http://xaviergorce.com/

 >>> Les personnes qui souhaiteraient féliciter la rédaction du journal Le Monde pour la hauteur de vue anti-raciste et la subtile distanciation qui émanent de cette élégante caricature peuvent en parler au médiateur de ce journal : mediateur@lemonde.fr



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7 commentaires:

Clisthène a dit…

Salir les victimes grecques, afin de louanger les bourreaux

Anonyme a dit…

Faut il prendre avec autant de sérieux les rubriques Economie et Politique de ce journal français fondé lors de la Libération du nazisme ? Beuve-Mery, reviens ! Ils sont devenus fous ! (des marchés financiers).

Jeanluc a dit…

ceux qui se croient drôles, qui se disent même humoristes, sans vouloir se rendre compte de qui arme leur "créativité", le rire du fort sur le faible ne m'a jamais semblé ni heureux ni libérateur. maintenant je rejoins M. Volkovitch pour dire : lisez les auteurs Grecs, romanciers, poètes, philosophes..., écoutez chanter la Grèce vivante et si proche de vous..., voyez des films grecs, préparez vous des repas grecs, apprenez cette langue magnifique, entrez avec bonheur dans cette culture qui parle de l'humain comme aucune autre et enseigne la vie depuis bientôt 3000 ans avec la même force, la même alacrité.

Xavier Gorce a dit…

Chère Michel,

Mon dessin ne vous a pas fait rire. C'est votre droit. Voici mes explications :

1 – le dessin n'est pas un article mais un angle humoristique sur un sujet qui peut être douloureux. Ce qui compte c'est qu'il soit juste ET drôle. Pour la drôlerie, on sait bien que l'humour est une valeur très subjective : ce qui fait rire les uns etc…

2 – Pour ce qui est de la justesse, le dessin – si l'on veut qu'il soit un apport et pas seulement un sujet de rire entre-soi – doit aller aussi à rebrousse-poil des idées entendues de la pensée dominante. La pensée dominante n'est pas la même selon le public auquel on s'adresse. Et ce dessin, qui pourrait être nauséabond dans un journal "de droite", me semble pouvoir être intéressant destiné à un public prétendument plutôt de gauche : il prend le contre-pied de la vision "de gauche" d'une Grèce et d'un peuple grec victimes des marchés. Or, d'après ce que je lis (je confesse que je ne suis jamais allé en Grèce), la part de responsabilité de la situation n'incombe pas qu'au système ou aux élites grecques : c'est toute la société qui vit au-delà de ses moyens, qui travaille au noir ou biaise avec l'impôt. Les plus riches certes – et donc les plus responsables – mais aussi l'ensemble des citoyens… ou je suis très mal informé.

3 – Pour la part mea-culpa, on ne peut peut-être pas aller jusqu'à dire que les Grecs son fainéants mais ne pas payer de taxes et d'impôt c'est également récupérer de l'argent indu, donc, à bénéfice égal, travailler moins… entre fainéantise et "arnaque", la différence est sur la nature de l'économie : le fainéant économise du temps de travail et l'arnaqueur triche sur l'argent. Mais le temps et l'argent, n'est-ce pas la même chose ?

Donc oui, le raccourci est provocateur, cinglant, en partie injuste, peut-être cruel et peut donc heurter mais c'est mon boulot.

J'assume donc le dessin et j'accepte sa critique, mais, personnellement, je le trouve assez juste dans le fond… et drôle dans la forme.

Pour ce qui est de ma rémunération ou du temps passé à faire un dessin, rien ne vous permet d'en juger. Et, cliché pour cliché, n'est-ce pas une vraie beauferie que d'imaginer un dessinateur qui touche des ponts d'or pour balancer un gribouillis fait en deux temps trois mouvements ? C'est ce qu'on reprochait à Picasso. Non pas pour me comparer à lui un seul instant – loin s'en faut – mais pour montrer la stupidité de ce genre d'argument digne du café du commerce.

Pour ce qui est des puissants, je crois les assaisonner assez souvent par mes dessins.

Vous pouvez également aller vous montrer où bon vous semble.

Bien à vous

Xavier Gorce

Dessinateur

(vous pouvez aussi faire circuler cette réponse auprès de vos amis, grecs, français ou autres…)

Solon a dit…

Donc monsieur Gorce persiste ! Il "assume" ce dessin, et, s'il "confesse" ne pas bien connaitre la Grèce (où il n'est jamais allé et qu'il ne connait que par ses lectures, dont il est permis ici de mettre en doute la qualité), il trouve décidément que son dessin n'est pas seulement "drôle" (!!!), mais "assez juste sur le fond". Accablant de bonne conscience.

Anonyme a dit…

Well, Mrs. Merkel if you plan to send the Hellenic Republic to the European Court for breaching the austerity package, we tell you that we are NOT afraid of you!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!! Send us!!!!!!!

If you want Mrs. Merkel you can leave the Euro!!!!!!!!!!!!!

Anonyme a dit…

J'ai découvert une chose depuis peu : je dois manquer d'humour moi aussi ! Le dessin de Monsieur Gorce n'a vraiment rien de drôle, n'a aucune qualité esthétique, et n'a rien de juste. Peu importe qu'il l'ait fait et qu'il en soit fier, c'est son problème, mais comment se fait-il que le jouranl ait laissé passé quelque chose dont la seule caractéristique est de salir un peuple qui souffre ?